30 septembre 2018 — La Ville de Montréal rendra accessible, sous peu, un registre des chiens “potentiellement dangereux”, lequel s’inscrit dans le cadre de son nouveau Règlement sur l’encadrement des animaux domestiques.
On ne peut que saluer cette initiative. La mairesse de Montréal, Valérie Plante, a vu juste en annulant l’interdiction des chiens de race Pitbull dans la métropole, décrétée par son prédécesseur, Denis Coderre.
Le problème des chiens agressifs se trouve bien souvent à l’autre bout de la laisse. Les éducateurs et comportementalistes canins ne cessent de le répéter : il est inutile d’interdire une race canine, car on ne règle pas le problème, qui est beaucoup plus profond. Pour en arriver à cette conclusion, “La Ville a tenu une réflexion citoyenne relative aux enjeux liés à la gestion animalière”, peut-on lire dans les faits saillants de sa nouvelle réglementation. Montréal s’est appuyée sur les résultats obtenus à l’issue de consultations, qui ont été menées tant auprès des citoyens que de nombreux acteurs expérimentés du milieu.
Limiter l’agressivité des chiens
Parmi les nouvelles mesures mises de l’avant, la Ville a voulu “limiter l’agressivité” et faire évaluer les chiens agressifs par un expert. Ceux qui sont considérés comme potentiellement dangereux, toutes races confondues, seront soumis à des conditions de garde strictes. Par ailleurs, les résidents montréalais ne pourront garder plus de huit animaux (par habitation) parmi les espèces permises (sans compter les poissons).
La nouvelle réglementation prévoit aussi des activités de sensibilisation et d’éducation, ainsi que des ateliers destinés à la prévention des morsures, qui seront offerts aux enfants. Bref, tout le monde s’entend, ou presque, pour dire que ces mesures représentent un compromis très acceptable, pour ne pas dire nécessaire.
Cela dit, on apprend également que Montréal obligera, dès 2020, la stérilisation des chiens, des chats et des lapins domestiques sur son territoire. Bien des gens estiment que cette initiative représente la solution clé, afin que moins d’animaux errants circulent dans nos rues. Mais d’autres s’objectent à ce qu’ils perçoivent comme une castration de masse, y voyant là une atteinte à la démocratie. Cette stérilisation forcée, bien qu’elle ait du mérite, suscite en eux une question fondamentale : pourrions-nous éventuellement assister à une pénurie d’animaux domestiques, par le fait d’une stérilisation outrancière?
Quelques recherches sur le Web viennent alimenter cette appréhension. En Belgique, notamment, une nouvelle disposition est entrée en vigueur dans les régions de la Wallonie, de la Flandre et de Bruxelles : “la stérilisation des chats domestiques et errants y sont désormais obligatoires, afin de lutter contre la prolifération des félins. Il s’agit d’une mesure unique en Europe”, précise la Fondation 30 millions d’amis, dont la mission consiste, entre autres, à lutter contre les abandons, l’expérimentation animale et le trafic des animaux.
On ne peut pas être contre la vertu, néanmoins, certaines décisions extrêmes peuvent être vectrices d’une dérive potentielle. La Chine nous a appris que la régulation des naissances, dans ce pays, a eu d’énormes effets pervers. Aujourd’hui, des millions d’hommes chinois ont renoncé au mariage et à avoir des enfants, car les femmes célibataires y sont tout simplement introuvables.
Il faut comprendre que de 1979 à 2015, on y limitait à un le nombre d’enfants par couple, sauf exception. Or, plusieurs conjoints préféraient les garçons. Lorsqu’ils avaient une fille, cette dernière était bien souvent donnée à l’adoption. Selon Wikipedia, “La politique de l’enfant unique visait le contrôle des naissances. Mise en œuvre par la Chine, elle était destinée à éviter la surpopulation du pays.” Les parents qui avaient plus d’un enfant se voyaient pénalisés. L’État chinois pratiquait aussi des “avortements” et “des stérilisations par la force.”
Mesure excessive?
Cette analogie à la Chine vaut son pesant d’or, car elle démontre que les politiques excessives peuvent conduire dans un précipice, voire une fosse abyssale dont la profondeur n’a jamais pu être mesurée.
Preuve que cet argument contre la castration est valable, Les amis des animaux, une association belge opposée à la stérilisation de masse des chats domestiques en déplore les méfaits: “Outre la disparition pure et simple d’une race”, il en résulterait de graves conséquences écologiques et sanitaires, par exemple la prolifération des rongeurs, la création de filières parallèles d’importation et d’élevages clandestins, sans compter “d’autres effets plus diffus, mais tout aussi importants, à savoir la perte de l’effet thérapeutique auprès des aînés; la perte d’un compagnon pour plusieurs personnes seules et une atteinte à la biodiversité”, peut-on lire dans une pétition mise en ligne sur petitions24.net.
Il se trouve également des personnes pour dire que la castration est une mutilation, au même titre que le dégriffage. On peut ne pas être d’accord avec ce raisonnement, mais démocratie oblige, il faut au moins en prendre notre et respecter les opinions de tout un chacun.
Disparition de chats pacifiques?
La pétition évoque aussi la disparition d’une race pacifique, ce qui enverrait un mauvais message aux jeunes, tout en provoquant de sérieux dommages à leurs repères culturels, affectifs et moraux. Pire encore, la rareté féline pourrait entraîner une hausse importante des prix pour obtenir un chat survivant, qu’il soit de race ou non. Mais aussi, les éleveurs seraient tentés d’appliquer des tarifs arbitraires.
Les amis des animaux pensent, en outre, qu’il en résulterait une augmentation dramatique des abandons de chats adultes, en raison des frais liés à la stérilisation. Sans oublier la disparition de nombreux commerces, une diminution des ventes dans les magasins, ainsi qu’une production à la baisse pour tous les fournisseurs d’articles pour chats, provoquant ainsi une augmentation du taux de chômage.
Solutions à la castration
Les Amis des animaux ne sont pas qu’en réaction face à la castration de masse. Ils proposent des solutions qui méritent que l’on y réfléchisse, afin de contrer une action unilatérale. À titre d’exemple, la stérilisation ne devrait être appliquée qu’aux chattes qui ont eu au moins une portée.
Quoi qu’il en soit, le service des relations publiques de la Ville de Montréal se dit confortable avec la stérilisation : “Elle permet un meilleur contrôle de la surpopulation animale, et fait partie des meilleures pratiques reconnues en cette matière”, nous a dit une porte-parole.
Bien évidemment, nous sommes loin d’en être arrivés à une pénurie d’animaux domestiques, car les effets de cette castration systématique ne se feront sentir qu’à long terme. Néanmoins, le sujet est à prendre au sérieux. Qu’en pensez-vous?
Photo 1-3-4-5-6:
kim_hester; conderdesign; anja21dec; Réalité Animale; Free-Photos.
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