Un couple d’éleveurs doit payer 3 816,84 $ en dommages-intérêts

Par François G. Cellier

27 juin 2018 — Les élevages qui vendent des animaux malades s’exposent à des poursuites judiciaires. Une décision rendue le 17 février 2017 par la Cour du Québec, Division des petites créances, l’a rappelé à un couple d’éleveurs québécois.

Dans cette cause, la demanderesse a obtenu quelque 3 816,84 $ en dommages-intérêts et moraux, après la mort de son Épagneul Cavalier King Charles, acquis chez les défendeurs.

Nombreuses maladies

Cette décision donne matière à réfléchir, car elle met en évidence l’une des nombreuses maladies qui peuvent affecter les animaux, dont ceux de race. Elle rappelle, également, que la loi a eu préséance sur le contrat de vente proposé par le couple d’éleveurs.

Ce contrat prévoyait, entre autres, que l’animal de compagnie était garanti jusqu’à l’âge de deux ans contre les tares héréditaires. Si nécessaire, l’Épagneul aurait été repris et remplacé par un autre équivalent, « dès qu’il aurait été possible de le faire. » En aucun cas, l’acheteur ne pouvait réclamer un remboursement en argent. Il était par ailleurs avisé qu’en cas de maladie, les frais vétérinaires pour soigner l’animal étaient à sa charge.

Déjà malade

Après avoir mangé un premier repas chez son adoptante, Romi est en proie à une diarrhée. Un vétérinaire prescrit un anticoccidien, ce qui soulage l’animal trois jours plus tard. Mais la semaine suivante, il cesse de manger.

Un examen révèle, dès lors, que Romi présente une « diminution importante de l’amplitude à l’ouverture de la gueule. » Il s’agit d’un « problème mécanique congénital héréditaire », conclut une vétérinaire. On lui prescrit à nouveau des antibiotiques.

Myosite juvénile

Dix jours plus tard, une autre vétérinaire suspecte une Myosite juvénile des muscles masticateurs. Le Dr Laurent Cauzinille, à l’emploi du Centre hospitalier vétérinaire de Frégis, en banlieue de Paris, explique comment s’exprime cette pathologie : « Il s’agit d’une affection inflammatoire qui touche d’abord et/ou exclusivement les muscles de la mastication. Cette affection est la conséquence d’un dysfonctionnement du système immunitaire. On parle d’une maladie auto-immune ou dysimmunitaire. »

Offre de remboursement partiel

Pour compenser les soucis et les tracas occasionnés par cette situation, l’éleveur offre à la demanderesse un autre chien de la même portée, ou un remboursement de 600 $, si elle désire garder Romi. Cette offre est refusée. La défenderesse lui refait cette proposition le lendemain, qui est encore une fois déclinée. Finalement, le 8 décembre 2015, le couple d’éleveurs reçoit une mise en demeure par la demanderesse, qui exige le remboursement du prix d’achat, soit 1 200 $.

Les jours passent et Romi ne va pas mieux, bien au contraire. Sa gardienne consulte un vétérinaire à plusieurs reprises entre novembre et décembre 2015. Puis, le 26 décembre, elle se rend d’urgence à la Clinique vétérinaire DMV. Ce jour-là, elle apprend qu’il vaudrait mieux euthanasier Romi. Une autre mise en demeure est par la suite envoyée au couple d’éleveurs, dans laquelle leur est réclamée la somme de 4 111,05 $.

L’éleveur est-il responsable de la mort de Romi?

Dans cette cause, le Tribunal a dû se poser la question suivante : « Les défendeurs pouvaient-ils être tenus responsables du décès prématuré du chien qu’ils ont vendu à la demanderesse? » Bien que les animaux ne soient plus considérés comme des biens meubles au sens de la loi (article 898.1 du Code civil du Québec), il reste que « le contrat de vente intervenu entre les parties constitue un contrat de consommation », précise le jugement. Il est donc visé par la garantie légale de qualité (vices cachés), ainsi que par les dispositions prévues à la Loi sur la protection du consommateur (LPC).

Parmi les lois pertinentes qui sont prévues au Code civil du Québec figure l’article 1726, lequel stipule, notamment, que « Le vendeur est tenu de garantir à l’acheteur que le bien et ses accessoires sont, lors de la vente, exempts de vices cachés qui le rendent impropre à l’usage auquel on le destine. » Le vendeur n’est cependant pas tenu de garantir le vice caché connu de l’acheteur.

Droit de recours judiciaire

En ce qui a trait à la LPC, il faut notamment retenir l’article 53. Celui-ci précise que « Le consommateur qui a contracté avec un commerçant a le droit d’exercer directement contre le commerçant ou contre le fabricant un recours fondé sur un vice caché du bien qui a fait l’objet du contrat, sauf si le consommateur pouvait déceler ce vice par un examen ordinaire. »

En outre, les défendeurs sont des vendeurs professionnels de chiens de race. Par conséquent, et conformément aux articles 1728 et 1729 du Code civil du Québec, « le vendeur professionnel est présumé connaître l’existence du vice qui affecte le bien vendu », expose le jugement. De plus, l’article 53 de la LPC stipule que l’ignorance des problèmes de santé de Romi ne peut être invoquée en faveur des défendeurs.

Détail des indemnités reçues

Par conséquent, le juge a accordé quelque 1 000 $ à la demanderesse, en guise de remboursement pour l’achat de Romi. Un autre montant de 2 316,84 $ lui a été payé par les défendeurs, à titre de dommages-intérêts pour les frais vétérinaires déboursés. Par ailleurs, le tribunal estime qu’en général, la valeur des dommages moraux pour les animaux a été majorée, depuis l’entrée en vigueur de l’article 898.1. Un montant de 500 $ lui a donc été accordé en vertu de cet article. Les défendeurs ont également dû ajouter des intérêts au montant total versé, à compter du 5 janvier 2016, date d’envoi de la mise en demeure par la demanderesse.

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